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jeudi 12 avril 2018

1,5 ° C de réchauffement dans seulement une décennie?


  Article original en Anglais par David Spratt

Merci à Michel-Pierre Colin pour la traduction



Les Accords de Paris
mettent le monde sur le
chemin de 3,4 ° C de
réchauffement pour 2100.
(Climate Action Tracker)
Le réchauffement planétaire de 1,5 °C est imminent, probablement dans une décennie à partir de maintenant. C'est la conclusion étonnante à tirer d'un certain nombre d'études récentes, examinées ci-dessous.

Comment atteindre un réchauffement de 1,5 ° C dans une décennie à compter de maintenant avec l'objectif de l'Accord de Paris 2015 de “maintenir l'augmentation de la température moyenne mondiale bien en-dessous de 2°C par rapport aux niveaux préindustriels et de poursuivre les efforts pour limiter l’accroissement de température à 1,5°C ?” En peu de mots, ça ne se peut pas.

Le texte de l'accord de Paris était une solution politique dans laquelle de grands mots masquaient des actes inadéquats. Les engagements nationaux volontaires de réduction des émissions depuis Paris placent désormais le monde sur une trajectoire de réchauffement de 3,4°C d'ici 2100 et de plus de 5°C si l'on prend en compte les risques élevés incluant les boucles de rétroaction dans le cycle du carbone.

Le résultat de Paris est une trajectoire d'émissions qui continue d'augmenter pendant encore quinze ans, même s'il est clair que "si la limite de 1,5°C ne doit pas être dépassée chaque année, le budget est déjà dépassé aujourd'hui ". Il y a deux ans, le professeur Michael E. Mann a noté : «Et qu'en est-il de la stabilisation à 1,5°C ? Nous sommes déjà à découvert. "

En effet, les scénarios d'émissions associés à l'objectif de Paris montrent que le réchauffement «dépassera» l'objectif de 1,5°C d'un demi-degré avant d’y revenir en refroidissant d'ici la fin du siècle. Ces scénarios reposent indûment sur la technologie BECCS (bioénergie avec capture et stockage du carbone) qui n'a pas fait ses preuves et serait appliquée dans la seconde moitié du siècle, parce que l'Accord de Paris n’inclut pas les fortes réductions d'émissions qui sont requises dès maintenant.

Le réchauffement climatique moyen est maintenant de 1,1°C au-dessus de la fin du XIXe siècle, et le taux de réchauffement devrait s'accélérer en raison des niveaux record d'émissions de gaz à effet de serre et parce que les efforts visant à nettoyer certaines des centrales électriques les plus polluantes au monde réduisent les émissions d’aérosols (principalement les sulfates) qui ont un impact de refroidissement à très court terme.
Aérosols : particules qui masquent partiellement le réchauffement climatique.

Alors maintenant, en 2018, la référence de 1,5°C de réchauffement est seulement à une décennie de distance ou même moins, selon les preuves de multiples sources des chercheurs sur le climat:

1,5°C de réchauffement plus dangereux qu'on croyait pour 2°C? À vous de voir


HENLEY et KING : En 2017, les chercheurs Ben Henley et Andrew King de Melbourne ont publié : “Trajectoires vers la cible de 1,5°C de Paris: Modulation par l'Oscillation Interdécenale du Pacifique” (Trajectories toward the 1.5°C Paris target: Modulation by the Interdecadal Pacific Oscillation (IPO)) à propos de l'impact de l'IPO sur le réchauffement futur. L'IPO est caractérisée par des fluctuations de la température à la surface de la mer et par des changements de pression au niveau de la mer dans le nord et le sud de l'océan Pacifique, qui se produisent sur un cycle de 15 à 30 ans. Dans la phase positive de l'IPO, les températures de surface sont plus chaudes en raison du transfert de la chaleur des océans vers l'atmosphère. L'IPO a été dans une phase négative depuis 1999 mais des prévisions récentes laissent penser qu'elle passe maintenant à une phase positive. Les auteurs ont constaté que «en l'absence d'influences externes de refroidissement, telles que des éruptions volcaniques, le point médian de la dispersion des projections de température dépasse l'objectif de 1,5°C avant 2029, basé sur les températures relatives à 1850-1900». Plus précisément, «une transition vers la phase positive de l'IPO (phénomène El Nino) conduirait à un dépassement de la cible autour de 2026 » et «si l'océan Pacifique reste dans sa phase décennale négative (La Nina), la cible sera atteinte environ 5 ans plus tard, en 2031 ».
La température projetée augmente avec l’IPO en mode positif (rouge) et en mode négatif (bleu) (Henley et King, 2017).

JACOB et autres : Un ensemble de quatre scénarios d'émissions futures connus sous le nom de trajectoires de concentration représentatives (Representative Concentration Pathways RCP), ont été utilisés depuis 2013 comme guide pour la recherche et la modélisation du climat. Les quatre trajectoires, connues sous le nom de RCP 2.6, 4.5, 6 et 8.5, sont basées sur le déséquilibre énergétique total dans le système énergétique d'ici à 2100. RCP8.5 est la plus élevée, et représente la trajectoire d'émission actuelle. Dans “Impacts Climatiques en Europe Sous un Réchauffement Planétaire de +1,5°C” (Climate Impacts in Europe Under +1.5°C Global Warming), publié cette année, Daniela Jacob et ses co-chercheurs ont trouvé que le monde devrait probablement dépasser le seuil de +1,5°C autour de 2026 pour RCP8.5, et “pour la trajectoire intermédiaire RCP4.5 le centre des estimations se situe dans une fenêtre relativement étroite vers 2030. Selon toute probabilité, cela signifie qu'un monde à +1,5°C est imminent."

KONG ET WANG : Dans une étude sur le changement estimé du pergélisol, “Responses and changes in the permafrost and snow water equivalent in the Northern Hemisphere” dans un scénario de réchauffement de 1,5°C, les chercheurs Ying Kong et Cheng-Hai Wang utilisent la moyenne d'un ensemble de multiples modèles provenant de 17 modèles climatiques globaux, avec des résultats montrant que le seuil de réchauffement de 1,5°C sera atteint en 2027, 2026 et 2023 sous les trajectoires respectives RCP2.6, RCP4.5, RCP8.5. Sur la trajectoire actuelle RCP8.5 à fortes émissions, la superficie estimée du pergélisol sera réduite de 25,55% ou de 4,15 millions de kilomètres carrés à 1,5°C de réchauffement.

XU et RAMANTHAN : Une étude récente par Yangyang Xu et Veerabhadran Ramanathan, “Well below 2°C : Mitigation strategies for avoiding dangerous to catastrophic climate changes” (Bien en-dessous de 2°C: Stratégies d'atténuation pour éviter des changements climatiques dangereux à catastrophiques), a examiné les risques haut de gamme ou «fat-tail» du changement climatique, dans une analyse des risques existentiels dans un monde en réchauffement. L'un des deux scénarios de base utilisés, appelé Baseline-Fast, supposait une réduction de 80% de l'intensité énergétique des combustibles fossiles d'ici 2100 par rapport à l'intensité énergétique en 2010. Dans ce scénario, le niveau de dioxyde de carbone atmosphérique avait atteint 437 parties par million (ppm) en 2030 et le réchauffement était de 1,6°C, ce qui suggère que le 1,5°C était dépassé aux environs de 2028. L'étude est discutée plus en détail ici.

ROGELJ et autres : Dans “Scénarios visant à limiter l'augmentation de la température moyenne mondiale en dessous de 1,5°C” (Scenarios towards limiting global mean temperature increase below 1.5°C), Joeri Rogelj et ses co-chercheurs établissent les futures émissions et le réchauffement sur la base de cinq «Trajectoires socio-économiques partagées» (Shared Socioeconomic Pathways SSP). Celles-ci "présentent cinq mondes futurs possibles qui diffèrent en matière de population, de croissance économique, de demande d'énergie, d'égalité et d'autres facteurs", selon CarbonBrief . Les quatrième et cinquième trajectoires représentent le monde dans lequel nous vivons actuellement: SSP4 est un monde de «forte inégalité», tandis que SSP5 est un monde de «croissance économique rapide» et de «modes de vie énergivores». Si nous regardons ces trajectoires tracées par rapport aux températures projetées, alors SSP5 dépasse 1,5°C en 2029 et SSP4 en 2031.

Température moyenne mondiale projetée pour cinq voies socio-économiques partagées (CarbonBrief)

SCHURER et autres : Dans “Interprétations de la cible climatique de Paris” (Interpretations of the Paris climate target), Andrew Schurer et ses collègues démontrent que le GIEC utilise une définition de la température moyenne à la surface du globe qui sous-estime la quantité de réchauffement au niveau préindustriel. La sous-estimation est d'environ 0,3°C, et un chiffre plus élevé inclut l'effet du calcul du réchauffement pour la couverture mondiale totale plutôt que pour la couverture pour laquelle des observations sont disponibles et le réchauffement à partir d'une vraie période pré-industrielle plutôt qu’à partir de la fin du XIXe siècle, comme base de référence. Si leurs découvertes étaient appliquées, le réchauffement serait maintenant de 1,3°C ou plus, et atteindre le repère de 1,5°C ne serait plus qu'à une demi-décennie seulement.

CONSÉQUENCES : Dans leur article de 2017 sur les risques climatiques catastrophiques, Xu et Ramanathan ont défini 1,5°C comme une référence pour un changement climatique «dangereux», comparé au repère de 2°C de la note politique conventionnée. Mais même cette note inférieure peut être trop optimiste, compte tenu des impacts que nous avons constatés aux deux pôles au cours de la dernière décennie. Quoi qu'il en soit, en considérant la réalité imminente de l'indice de référence de 1,5°C, il est important de considérer ce qui est en jeu:

  • Dans une décennie et à 1,5 ° C, nous pourrions bien avoir été témoins d'un Arctique libre de glace de mer en été, une circonstance qui, il y a tout juste deux décennies, n’était pas supposée se produire avant une centaine d'années. Les conséquences seraient dévastatrices.
  • En 2012, James Hansen, directeur scientifique de la NASA, a déclaré à Bloomberg : « Notre plus grande inquiétude est que la perte de la banquise en Arctique ne menace gravement le passage de deux autres points de basculement: l'instabilité potentielle de la calotte glaciaire du Groenland et les hydrates de méthane... Ces deux points de basculement auraient des conséquences pratiquement irréversibles sur des échelles de temps pertinentes pour l'humanité. » Un article de recherche très réputé publié en 2012 estimait que « le seuil de réchauffement conduisant à un état monostable, essentiellement un état sans glace, est de l'ordre de 0,8-3,2°C, avec la meilleure estimation de 1,6°C » pour la calotte glaciaire du Groenland.
  • En 2015, les chercheurs ont examiné les dommages aux éléments du système - y compris la sécurité de l'eau, les sols pour les cultures de base, les récifs coralliens, la végétation et les sites du patrimoine mondial de l'UNESCO - au fur et à mesure que la température augmente. Ils y ont trouvé tous les dégâts du changement climatique dans des catégories vulnérables comme les récifs coralliens, la disponibilité en eau douce et la vie végétale pourraient arriver avant que le réchauffement de 2°C ne soit atteint, et une grande partie avant 1,5°C de réchauffement.
  • En 2009, des scientifiques australiens ont contribué à un important document de recherche qui a montré que la préservation de plus de 10% des récifs coralliens dans le monde nécessiterait de limiter le réchauffement à moins de 1,5°C. Des recherches récentes ont montré que l'augmentation du réchauffement océanique autour de la Grande Barrière de Corail en 2016, qui a entraîné la perte de la moitié du récif, a une probabilité de 31% de se produire n’importe quelle année au niveau actuel de réchauffement. En d'autres termes, une décoloration sévère et une perte de corail sont probables en moyenne tous les 3-4 ans, alors que les coraux mettent 10-15 ans à se remettre de tels événements.
  • Il est prouvé qu'une élévation globale de la température de 1,5°C est susceptible de provoquer un dégel généralisé du pergélisol en continu jusqu'à 60° de latitude nord. À 1,5°C, la perte de zone de pergélisol est estimée à quatre millions de kilomètres carrés
  • La fréquence des événements extrêmes d'El Niño devrait doubler par 1,5°C de réchauffement.
  • À 1,5°C, il est très probable que des conclusions publiées pour la première fois en 2014, à savoir que des sections de l' inlandsis Antarctique occidental aient déjà dépassé leur point de basculement pour une élévation du niveau de la mer de plusieurs mètres, auront été confirmées.
  • Il y a quatre ans, les scientifiques ont constaté que «le recul de la glace dans le secteur de la mer d'Amundsen en Antarctique de l'Ouest n’était plus stoppable, avec des conséquences majeures: le niveau de la mer augmenterait de 1 mètre dans le monde entier… Sa disparition enclenchera probablement l’effondrement du reste de la calotte glaciaire de l’Antarctique Ouest, ce qui entraînera une augmentation du niveau de la mer comprise entre 3 et 5 mètres. Un tel événement déplacera des millions de personnes dans le monde. “Eric Rignot, chercheur de pointe sur la cryosphère s’étonne :" Vous regardez l'Antarctique occidental et vous pensez: c'est toujours là ?”
  • À 1,5°C, une élévation du niveau de la mer de plusieurs mètres et peut-être des dizaines de mètres aura été bloquée dans le système. Dans les climats passés, des niveaux de dioxyde de carbone d'environ 400 ppm (que nous avons dépassés il y a trois ans) ont été associés à des niveaux de la mer autour de 25 mètres au-dessus du présent niveau. Et il y a six ans, le Prof. Kenneth G. Miller a noté que "l'état naturel de la Terre avec les niveaux actuels de dioxyde de carbone est celui d’avec des niveaux de mer d'environ 20 mètres plus haut qu'aujourd'hui".

Clairement, comme l'ont écrit l'ancien chef de la NASA sur le climat, James Hansen, et ses co-auteurs l'année dernière,
«le monde a dépassé la cible appropriée pour la température mondiale». Ils ont noté le danger que les cibles de 1,5°C et 2°C sont loin au-dessus de la plage de température de l’ère de l'Holocène (civilisation humaine), et que si de tels niveaux de température sont autorisés à long terme, ils stimuleront des rétroactions amplificatrices "lentes" qui ont le potentiel d’échapper au contrôle de l'humanité. Par conséquent, "limiter la période et l'ampleur de l'excursion de température au-dessus de l'échelle de l’Holocène est crucial pour éviter une forte stimulation des rétroactions lentes".

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David Spratt ajoute (et je suis de son avis)
Et dans toutes ces preuves, qu'est-ce qui m'inquiète le plus? D'après mon expérience, à quelques exceptions près, ni les responsables des politiques climatiques ni les défenseurs de l'action climatique n'ont une compréhension raisonnable de l'imminence de ces 1,5°C et de ses conséquences.
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